
Tracklisting:
1-Knife
2-Ground
3-The river
4-Get away
5-Desperately closed
6-Cruel to you
7-Dark grey
8-Answer
9-Wine
10-Summer
11-The game I don't want to play
17.5/20 |
Derrière
cet étrange patronyme se cache l’un des laissés
pour compte de la dynamique Genevoise de la fin des 90’s, début
00’s. Un petit recadrage chronologique s’impose. A la fin
des 90’s, Genève a vu se développer et se populariser
quelques-uns de ses plus ardents représentants de la musique
extrême. Difficile de passer à côté de Knut
et Nostromo, sans oublier les outsiders Brazen et Shora. Ces quatre
groupes ont bénéficié d’une certaine popularité
et mise en avant médiatique (toute proportion gardée,
nous sommes à l’échelle de la scène post
hardcore underground, celle des fanzines qui grappille à la limite
sur la presse nationale spécialisée). Cette exposition
était plus que méritée, de part premièrement
la qualité des groupes et ensuite par l’énorme travail
fournit par le collectif Evil, regroupant alors Snuff records (label
géré par des gens de Knut), le mailorder Evil (Snuff,
Molaire (ex Waiting For An Angel), Hannibal), le fanzine du même
nom ainsi qu’une activité concernant l’organisation
de concerts. En légère marge de cette mouvance, se trouvait
ce jeune quatuor affublé de ce nom mystérieux. Pour des
raisons qui demeurent pour moi mystérieuses, Impure Wilhelmina
n’a pas bénéficié de cette mise en avant
de l’époque. Soit.
Un 7’’, un mini CD et sort enfin Afraid, premier album du
groupe. Les influences Breach et Neurosis se font sentir, pas de doutes
là-dessus, Mais IW dégage une sensibilité bien
particulière, entre désespoir et rage folle. Bonne, très
bonne surprise. Affaire à suivre.
En 2003, les Suisses remettent le couvert et c’est sur les labels
français Waiting For An Angel (Iscariote, Envy, Amanda Woodward)
et Space Patrol que ces derniers nous livrent leur deuxième long
effort, intitulé I Can’t Believe I Was Born In July, référence
directe au mois de naissance du Michaël (guitare, chant).
A la première écoute, j’ai un peu de mal. L’album
est touffu, me semble moins lourd et direct que son prédécesseur.
J’avoue ne pas trop savoir quoi en penser. Mais bon, persévérons.
Impure Wilhelmina n’est à priori pas une fille facile et
il va falloir la jouer fine dans les techniques d’approche. Et
c’est au bout de plusieurs écoutes plus ou moins attentives
(il est bon des fois de laisser la musique voguer seule et lui donner
l’occasion de vous surprendre) que finalement les rôles
se sont inversés et que la Genevoise a réussi à
attraper mon coeur (je nierai avoir écrit ça).
Premièrement, quelle idée osée mais géniale
que de commence réellement l’album dès le troisième
morceau, le premier étant l’inquiétante ballade
acoustique Knife, suivi d’un instrumental. L’album ne se
révèle pas dès le premier morceau, ne dévoilant
que très légèrement ses atours. Et c’est
là qu’on se prend The River en pleine gueule et également
ce qui fait la marque de fabrique d’Impure Wilhelmina. A savoir
la quête DU riff. Oui, LE riff, celui qui s’incruste au
plus profond du cerveau, celui qui obsède, celui qui tourne en
boucle dans la caboche. Tourner est le mot qui convient parfaitement.
A partir DU riff, la structure se crée, permettant à ce
même riff de revenir aussi souvent que nécessaire, de faire
gagner le morceau en efficacité et en puissance. Ajoutez à
ça une réelle inspiration mélodique, une parfaite
adéquation des guitares qui s’inspirent autant du métal
traditionnel que de la noise la plus vicieuse, une basse ronde et très
présente, aussi bien rythmiquement que mélodiquement,
quelques bons riffs de batterie bien sentis, et vous aurez le plus gros
d’Impure Wilhelmina. Pour affiner l’identité sonore
du groupe, posez sur le tout la voix terriblement écorchée
et puissante de Michaël et vous aurez tous les ingrédients.
Voix qui sait se faire claire et mélodique quand c’est
nécessaire (Answer, The game I don’t want to play), sans
jamais tomber dans le piège de l’alternance voix claires,
voix hurlées, tellement chère à toute la scène
metalcore actuelle (qu’elle croule sous le poids de sa médiocrité).
Mais de bons morceaux ne font pas nécessairement un bon album
me direz-vous. Et vous auriez tout à fait raison. Combien de
groupes sont capables des morceaux qui individuellement sont des petites
bombes mais qui ne tiennent pas la route le temps d’un album ?
Combien sont capables de maintenir l’attention plus d’une
heure ? Vous avez une idée de la réponse. Impure Wilhelmina
fait partie de la seconde catégorie.
Le talent des Suisses, c’est de savoir nuancer, ne pas jouer systémiquement
sur la même formule, aérer le disque au moment opportun
ou au contraire renforcer la tension. Un vrai travail de composition
globale. Je ne peux qu’apprécier et saluer la performance.
Surtout quand celle –ci se termine par le monstrueux The Game
I Don’t Want To Play, morceau de 20 minutes à la croisée
des chemins entre doom pachydermique et rock progressif. Tiens, ça
me fait penser que je n’ai même pas parlé du style
joué par les Genevois. Finalement, est-ce bien important ? N’est-ce
pas l’émotion ressentie qui prime avant toute chose plutôt
que de savoir si on écoute du métal mes couilles ou du
hardcore ta mère ? De toute façon, la musique d’Impure
Wilhelmina est difficile à définir, les influences du
groupe étant tellement vaste et bien assimilées. Ou je
trouve une étiquette à rallonge ridicule, où je
sors un terme générique qui veut tout et rien dire, où
je me tais sur ce sujet. Troisième option. Aller, je vais être
sympa, Waiting For An Angel disait que la musique du groupe se trouvait
à la croisée des chemins de Breach, Steve Von Till et
Opeth. Vous voilà bien avancés, hahaha ! Et histoire de
brouiller les pistes, y a même une référence, pour
ne pas dire un pompage direct de Stevie Wonder dans Answer. Mais il
est au niveau des paroles celui-là.
Parlons-en des paroles. Elles sont à mon sens indissociables
de la musique du groupe. Les textes, écrits par Michaël,
ne sont pas des modèles de littérature, ne sont pas des
démonstrations de maîtrise du langage et de figures de
style maîtrisées et utilisées à outrance.
Loin de là, très loin de là. Au contraire, le style
est assez pauvre mais tout comme pour la musique, ça fait mouche.
Impossible de passer à travers ces textes touchants, violents
et naïfs. Des mots simples, des phrases courtes (pas comme moi),
qui vont direct droit au cœur. C’est un véritable
carnet intime qui nous est révélé ici. On peut
parfois sourire devant cette naïveté presque adolescente
d’un Get Away comme on va grincer des dents devant la violence
d’un Wine. Et c’est en lisant en écoutant la musique
que toute la puissance et le talent d’Impure Wilhelmina nous sont
révélés. Chapeau bas, je m’incline.
|